Résister au fascisme

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JOSE combattant républicain du Parti Socialiste Unifié Catalan (PSUC)

JOSE se vieillit volontairement auprès des autorités administratives du front populaire pour rejoindre l'armée républicaine en 1936 et combattre. Son initiative réussit, elle est la deuxième. Une première fois il n'avait pas été admis, à cause de son trop jeune âge, "à se faire embarquer, comme il le dit, dans les camions". JOSE est incorporé dans la 27e division qui fait partie de la 122e brigade. Après une très courte période de formation il est dépêché sur le front où il est artilleur.

Les parents de JOSE se sont résignés à voir encore un fils partir à la guerre. Ils ne l'approuvent pas et son père, dans une lettre lui fait part de sa désapprobation. JOSE y répond affirmant une nouvelle fois de sa détermination à défendre et à faire triompher avec les armes le front populaire, garant d'un avenir meilleur pour les travailleurs. JOSE fait route sur SARAGOSSE, dans l'armée partie de LERIDA, La colonne CARLOS MARX (KARL MARX) qui sera intégrée à la 27e division du PSUC. Convergeant aussi en direction de SARAGOSSE les colonnes libertaires de DURRITI, ORTIZ et ASCASO de la CNT-FAI, du POUM de Maurin, les troupes de PENALVER et de BUENO ESQUERRA.

Une grande partie des combattants est partie de BARCELONE. BARCELONE est, à cette époque le point de rencontre des révolutionnaires du monde entier. Les communistes se sont installés dans l'hôtel COLON, les anarchistes, très nombreux, dans les locaux du syndicat patronal. "Le syndicat gastronomique nourrit à midi et le soir ceux qui sont dans le besoin dans les nombreux hôtels et restaurants y compris l'hôtel luxueux du Ritz"...(H.E. KAMINSKI - Ceux de BARCELONE - Allia Paris - 1986). Les anarchistes imposent dans l'agglomération la collectivisation des entreprises industrielles de plus de cent salariés. Les relations qu'ils entretiennent avec le gouvernement légal catalan sont difficiles du fait de la radicalisation de leurs positions. En Aragon la collectivisation est encore plus radicale, dans nombre de villages l'argent est aboli. "Dans les provinces républicaines le phénomène se généralise : " on assiste à une grande diffusion de la collectivisation soutenue par les plus importantes organisations paysannes, les anarchistes et par beaucoup de socialistes et de communistes (G. RANZANO - La guerre d'ESPAGNE - XXe siècle - édit CASTERMAN - GIUNDI - 1995). Un fonctionnement collectiviste décidé par les gens eux-mêmes, dans les campagnes, est une expérience unique de l'Europe de l'Ouest en 1936.

Les Catalans fournissent de forts contingents de soldats volontaires, des miliciens, qui gardent les insignes de leur appartenance politique. L'entraînement des engagés est rapide, il faut faire face dans l'urgence à l'armée professionnelle des généraux factieux. La résistance des anarchistes à la discipline militaire s'avère très dommageable à l'efficacité stratégique des républicains.

Tandis que le front de L'ARAGON se met en place pour le contrôle de SARAGOSSE, dans le centre de l'ESPAGNE l'armée de MOLA met en difficulté les défenses républicaines. Le commandement de la partie de l'armée restée fidèle à la République comprend pourtant des hommes d'une très grande valeur organisatrice et stratégique comme VICENTE ROJO, les frères JOSE MARIA et FRANCISCO GALAN, tous deux communistes. A l'Alto de LEON et à SOMOSIERRA se livrent les premières grandes batailles, très dures. Logiquement la république avec plus de combattants devait gagner mais ses divisions la paralysent avec le comportement certes courageux, héroïque mais malheureusement imprévisible des anarchistes. Une des meilleures troupes, sinon la meilleure, est dans les miliciens regroupés dans le cinquième régiment constitué par le parti communiste espagnol avec mille combattants mis en place dés la fin juillet 1936 sur le front madrilène. Sa logistique rigoureuse est calquée sur le modèle de l'armée rouge bolchevique avec en parallèle son côté militaire avec soldats officiers et sous officiers et son côté politique avec ses commissaires. Son commandant en chef ENRIQUE CASTRO DELGADO est un jeune officier secondé très efficacement par un ancien carrier, JUAN MODESTO, un ancien bûcheron, le député communiste de CADIX DANIEL ORTEGA, le communiste italien VITTORIO VIDALI appelé CARLOS CONTRERAS, l'exilé portugais le capitaine OLIVIERA, le capitaine BENITO SANCHEZ, VALENTIN GONZALEZ dit EL CAMPESINO (le paysan). JOSE est rattachée par sa brigade à cette armée.

De la région de SARAGOSSE, JOSE et ses camarades se portent en direction de TERUEL, la plus au sud des villes D'ARAGON en rébellion contre la république. Il est l'hiver 1936 sur le front de TERUEL. La neige est très abondante, le froid est vif, les combats dans la zone sont incessants. L'armement n'est pas à la hauteur de celui dont dispose l'armée fasciste que l'ALLEMAGNE nazie et L'ITALIE approvisionnent. Un jour, comme tant d'autres, il subit une violente attaque au canon, et ce jour là il est grièvement blessé, aux jambes, par les éclats d'un obus qui explose pas très loin de lui. Dans la neige il reçoit les premiers soins, il se souvient toujours des piqûres qui lui sont faites. Il reste, bien que blessé, plusieurs jours dans la zone des combats. Sa robuste constitution lui permet de tenir vaille que vaille, dans la douleur et l'angoisse. Il est évacué sur un hôpital à BARCELONE.

A hôpital, c'est finalement dans l'épreuve, un moment de bonheur. Une infirmière, fille d'un anarchiste espagnol bien connu, s'occupe plus particulièrement de lui. Une attirance réciproque les rapproche. D'autant que jeunes tous les deux, de gauche mais sur des positions politiques différentes ils ont de très vives et très longues discussions qui, finalement, les unissent plus qu'elles ne les séparent. JOSE en fut si impressionné, que, guéri, il la recherche mais en vain à BARCELONE pour en dernier lieu apprendre qu'elle s'était marié à un chauffeur...

Entre sa sortie et hôpital et une nouvelle affectation JOSE bénéficie d'une permission qui lui permet, dans des conditions difficiles, de rejoindre à vélo la petite ferme familiale. Deux jours de voyage lui sont nécessaires. C'est la dernière fois qu'il verra sa mère car après la défaite républicaine il est interdit de territoire par FRANCO. De plus il se jurera de ne plus aller en ESPAGNE tant que le fascisme y sera maître. La maman tente en vain au dernier moment de s'opposer au départ de son jeune fils. "Si tu t'en vas tu n'es plus mon fils" lui déclare-t-elle. Cet ultime argument n'y fait rien, JOSE repart avec cependant tout l'amour de cette mère de la campagne où tout épanchement est vite réprimé. Elle décèdera sans ne jamais plus revoir JOSE.


José Aresté, au centre,et deux de ses frères. A gauche, son frère qui fut lui aussi blessé dans les combats contre les troupes de Franco.

JOSE rejoint à nouveau BARCELONE où le PSUC l'affecte à des taches de reprise en main de soldats fuyant les combats qui deviennent de plus en plus difficiles pour la république. Elle a à faire face, en plus des armées de FRANCO à L'ALLEMAGNE hitlérienne avec la légion CONDOR (30000 soldats) et à l'ITALIE mussolinienne avec la légion Azur (50000 soldats) dotées de l'armement le plus moderne qui soit pour l'époque. JOSE, même actuellement, regrette amèrement la politique officielle de la France de non-intervention mise en avant par le chef de gouvernement socialiste LEON BLUM. Pourtant un accord d'assistance mutuelle unissait avant même la guerre civile les deux républiques. Dés le début du putsch militaire un télégramme de demande d'aide était adressé par le front populaire à L. BLUM en ces termes " Sommes surpris par dangereux coup de main militaire, vous demanderons de vous entendre immédiatement avec nous pour fourniture d'armes, d'avions - Fraternellement - GIRAL". L'attentisme trouble profondément une partie de la gauche française qui attend une position ferme de la part de la politique du front populaire français. Les socialistes de JEAN ZYROMSKI, les communistes sont pour une aide massive à l'ESPAGNE républicaine. LEON BLUM et la majorité qui le suit finiront par céder devant la pugnacité des communistes et des progressistes de gauche. Des armes, du matériel franchiront la frontière. Un contingent français des brigades internationales est constitué et se porte en renfort des républicains espagnols. Des noms deviendront célèbres par la suite : NENNI, TOGLIATTI, TITO, MARTY, ARTHUR LONDON, RAJK, KISCH, MANN, ROL TANGUY, COLONEL FABIEN. Les pertes des brigades sont lourdes mais pendant un temps les troupes des généraux factieux seront tenus en échec notamment avec la bataille de MADRID, à JARAMA, à GUADALAJARA, sur L'EDRE. La décision de non-intervention à laquelle était associée L'ANGLETERRE fut l'un des éléments forts de la désagrégation du front populaire en FRANCE en 1937-38 comme le montre bien le livre de SERGE WOLIKOW " Le Front populaire en FRANCE - 1996 - Editions complexe. Seule l'URSS apporte au plan matériel surtout un soutien logistique important mais que STALINE fait payer très cher à la république espagnole, se faisant remettre les réserves en or de sa banque ce qui n'a pas manqué d'être exploité fortement par les droites.

Dessin intitulé "dernière leçon du maître", représentant un professeur de la zone républicaine fusillé devant lequel se recueillent deux de ses élèves.

Peu à peu les républicains perdent du terrain devant un ennemi en 1938 largement supérieur en moyens de guerre, hommes et matériel, malgré l'héroïsme quotidien des miliciens et des brigades internationales. Les fascistes de toutes nationalités se livrent à de telles atrocités, qu'en FRANCE, un écrivain catholique BERNANOS, pourtant acquis au départ à la droite, est révolté, et fait part de ses sentiments dans un roman célèbre " les cimetières sous la lune". GUERNICA ce terrible bombardement d'une population civile le 26 avril 1937 au pays basque, innocente, exécuté par l'aviation hitlérienne de la légion CONDOR et franquiste, horrifie toutes les gauches de tous les pays. PICASSO en fait un tableau dont le tragique résonne toujours dans la conscience humaine. Plus tard BARCELONE subit l'assaut de l'aviation fasciste mais italienne le 16 et 17 mars 1938 et le bilan en fut tout aussi terrible. Les graves divisions dans la gauche espagnole débouchent sur des drames fratricides comme à BARCELONE en Mai 1937. C'est l'une des pages les plus noires de la république progressiste qui l'affaiblit considérablement. Le POUM est dissout et ses militants arrêtés et condamnés, son chef ANDRE NIN disparaît en prison. "Les heurts entre les unités communistes fidèles à NEGRIN, tenant de la résistance à outrance, et les anarchistes ralliés à la junte antigouvernementale du Colonel CASADO firent 2000 morts entre le 5 et le 10 mars 1939" - (ANNE DULPHY - Histoire de L'ESPAGNE de 1814 à nos jours). En novembre 1938 le départ des brigades internationales sur la demande du gouvernement républicain va accélérer sa défaite. Ce départ donne lieu à une cérémonie particulièrement émouvante où la Pasionnaria prononce un discours qui frappe les contemporains par sa vigueur et dont les paroles à l'égard des brigades restent encore célèbres :"Vous pouvez partir avec fierté. Vous êtes l'histoire. Vous êtes la légende. Vous êtes l'exemple héroïque de la solidarité et de l'universalité de la démocratie".

Guernica, par P.Picasso (1937). Guernica est une petite localité de 7000 habitants, ville historique, ville sainte des Basques. En 1937 à 30 km du front elle sert de refuge à 3000 ou 4000 Basques. Lundi 26 avril, c'est jour de marché. Des paysans sont là avec leur famille. 16h30... des avions allemands apparaissent, ils bombardent la ville, mitraillent les populations jusque vers 18h. On recense les victimes: 1654 morts 889 blessés. Les nationnalistes déclarent que les Basques ont incendié la ville. Mais les correspondants de guerre attesent les faits. Les preuves.

JOSE avec ses camarades encore en vie parfois blessés, refluent début 1939 en direction de la frontière française. BARCELONE est tombé le 26 janvier 1939, LERIDA avait succombé à la fin d'avril 1938. Dans le mouvement de retraite s'ajoute l'exode de très nombreux civils. Le flot vers la frontière est impressionnant et tous ces ESPAGNOLS attendent beaucoup de la FRANCE. On ne peut, encore maintenant, que ressentir de la honte à l'égard de notre pays quand on constate comment la foule des républicains, désemparée, meurtrie au plus profond d'elle-même, dans sa chair, dans son âme fut accueillie sur notre territoire. Il est vrai que la FRANCE vivait depuis 1938 la revanche de la grande et moyenne bourgeoisie sur le front populaire avec le gouvernement du radical DALADIER et de l'homme des droites P. RAYNAUD.

JOSE, en février 1939, découvre la France dans les pires conditions qui soient et pendant ce temps L'ESPAGNE devient franquiste. Le national catholicisme règne en maître et l'ordre fasciste s'instaure pour de longues années. Le régime est inauguré d'abord par l'expiation dans le sang des républicains La mise hors la loi de toute idée, de tout concept républicain se poursuit ensuite jusqu'à la mort en 1975 de FRANCO. Un caudillo qui fait garrotter encore jusqu'à deux mois avant sa mort! La terreur franquiste correspond à une volonté farouche "d'éradication des mauvais bergers" soutenue trop longtemps par l'église dont les pouvoirs s'étendent dans tous les domaines de la vie publique.

Entre 1939 et 1945 les historiens dénombrent :

- 200 000 fusillés .Dans les premiers mois les pelotons fusillent sans interruption : " 250 par jour à MADRID, 150 à BARCELONE" selon une confidence de FRANCO au comte CIANO à la mi 1939 (G. HERMET - L'ESPAGNE au XXe siècle - 19 .. - édit)

- 270 000 détenus politiques qui s'abaissent à 74 000 en 1944 et augmentent à nouveau en 1947-48 à la suite de mouvements de grève.

En 1939-1940, 6 000 instituteurs sont fusillés, 7 000 sont emprisonnés. L'éducation laïque est dans la ligne de mire du nouveau régime. En janvier 1946 l'exécution de 14 opposants à FRANCO dont celle de CRISTINO GARCIA, un chef de la résistance dans le sud de la FRANCE, libérateur du Gard et de l'Ardèche, amène PARIS à fermer sa frontière avec L'ESPAGNE le 1er mars 1946.

le Canard Enchainé, 22 août 1939

Mais alors que le franquisme était isolé, mis au ban des nations européennes, à la sortie du deuxième conflit mondial, la guerre froide sovieto américaine permet à FRANCO de refaire surface. Les Américains lui apportent une aide financière et politique considérable en échange de l'installation de bases militaires. La FRANCE qui soutient de fait le militarisme américain rouvre ses frontières à L'ESPAGNE en 1948. Le franquisme grâce à cela se sauve et perdure encore vingt ans. Avec lui toujours des exécutions politiques. Celles d'ANTICH militant Anarchiste et de JULIAN GRIMEAU, militant du PCE provoquent en FRANCE et dans beaucoup d'autres pays une immense protestation à laquelle se joignent d'ailleurs les papes Jean XXIII et Paul VI. La condamnation par les hommes de progrès est unanime. Elle reste dans la mémoire des générations actuelles et de celles des aînés.

Des destins qui se croisent par delà les frontières